Olivier Faure : « J’ai envie de conduire la renaissance des socialistes »

Olivier Faure : « J’ai envie de conduire la renaissance des socialistes »

Retrouvez ici l’entretien accordé par Olivier Faure au journal Le Monde à l’occasion de sa déclaration de candidature pour « conduire la renaissance des socialistes » :

Le Monde : La décision de Najat Vallaud-Belkacem de ne pas être candidate à la tête du PS ouvre la voie à d’autres ambitions. Qu’en est-il pour vous, serez-vous candidat ?

Olivier Faure : J’ai envie de conduire la renaissance des socialistes. Je suis candidat pour être le premier responsable du PS. Que des ministres qui ont beaucoup donné pendant cinq ans aient aujourd’hui besoin de faire d’autres choix de vie, je le comprends très bien et je le respecte.

Prendre la décision de s’engager à la tête du Parti socialiste dans l’état dans lequel il se trouve implique une motivation, une envie. Il n’y a pas de place pour l’hésitation : si vous hésitez, c’est que vous ne devez pas y aller. J’ai fait le choix d’y aller, je n’hésite pas. Je suis déterminé à réussir la refondation, à reconstruire un collectif et une crédibilité en rassemblant les énergies et les talents.

Le PS est moribond. Pensez-vous qu’il ait encore sa place dans le « nouveau monde » ?

Personne n’a remplacé le Parti socialiste. Qu’il s’agisse du libéralisme jupitérien de l’un, du populisme protestataire de l’autre ou du nationalisme identitaire de la troisième, aucune de ces visions ne se substitue aux objectifs et aux réponses socialistes.

Placés devant un choix difficile, les électeurs de gauche se sont détournés de nous. La politique, c’est une affaire d’offres, et certaines, plus nouvelles et plus optimistes, ont davantage séduit que la nôtre. Les Français n’ont pas perçu notre capacité à changer leur quotidien et à mener ensemble un projet pour le pays.

Nous devons redonner le désir de gauche. Si nous y arrivons, nous serons de nouveau appelés aux responsabilités. Sinon, nous vivrons un lent déclin. Je ne m’y résous pas.

Comment faire pour redonner ce « désir de gauche » ?

Nous devons d’abord modifier nos propres comportements, travailler sérieusement, être solidaires, respecter des règles communes.

Le cœur de notre identité, hier comme aujourd’hui, c’est la lutte contre les inégalités. Nous en avons fait reculer certaines pendant les années où nous avons gouverné. Mais dans le nouveau monde de la mondialisation et du numérique en naissent de nouvelles, qui appellent de nouvelles réponses. C’est le rôle du PS de les inventer.

Comment « modifier les comportements » que vous évoquez au sein du parti ?

Nos principes et nos valeurs sont actuels. Ce qui l’est moins, c’est notre organisation, notre façon de fonctionner en vase clos, d’avoir laissé les clans remplacer les idées. Cela, il faut le combattre fortement, brutalement. Ce n’est plus possible de vivre avec des chapelles dont plus personne ne connaît l’origine.

Mais ce n’est pas parce que le sommet est malade que l’ensemble de la structure est contaminé. Allez voir ce qui se passe à Nantes, Rennes, Lille, Strasbourg, Paris ou Clermont-Ferrand, dans nos départements ou nos régions, et vous aurez une autre image de ce qu’est la gauche. Il faut s’appuyer sur nos expériences territoriales, ne pas nous replier sur un entre-soi « solférinien ».

Quelles sont vos pistes pour réformer le parti ?

Nous devons tout changer et rompre avec un fonctionnement centré sur le national. Le PS doit devenir un parti plate-forme ouvert à tous sans limitation — militants, citoyens, intellectuels et acteurs du mouvement social. Je veux construire un laboratoire collectif, un incubateur d’idées, une fabrique d’expérimentations.

Le PS appartient à ses adhérents, nous leur devons des outils pour comprendre et agir, mais surtout une écoute et une prise en compte de leur avis, tout le temps, et pas seulement au moment des conventions et des congrès.

Le renouveau du PS prendra corps dans les territoires, le national doit se nourrir de l’action locale des fédérations et des collectivités que nous dirigeons, il doit aussi se mettre au service des initiatives locales de refondation et de reconquête.

Les candidatures pour le poste de premier secrétaire se multiplient. N’y a-t-il pas un risque de reproduire les batailles de personnes que le parti a déjà connues par le passé ?

Il y a un risque. C’est précisément la raison pour laquelle je suis candidat aujourd’hui. J’ai le sentiment d’être celui qui, président de groupe à l’Assemblée depuis un an, a fait la démonstration qu’il pouvait rassembler et mettre au travail des gens très différents.

Depuis que je suis président, la délibération est collective, tous les talents peuvent s’exprimer, toutes les compétences sont valorisées. Il n’est plus question d’écarter les meilleurs parce qu’ils font de l’ombre. Voilà ma méthode, c’est celle que j’appliquerai au Parti socialiste.

Faut-il faire l’inventaire du quinquennat Hollande pour redresser le parti ?

Bien sûr. Il faut arriver à comprendre ce que les Français ont jugé. Quand on réussit, on est réélu ; sinon, c’est que quelque chose n’a pas été compris, ou pas accepté. Mais quand on dit « inventaire », on pense généralement seulement à la colonne « débit ». Il ne faut pas oublier la colonne « crédit ». Il n’y a d’avenir pour nous ni dans le dénigrement exclusif ni dans le déni.

François Hollande n’est donc pas le responsable de la débâcle.

C’est facile d’imputer les choses à une seule personne. Notre responsabilité est collective. Il y aurait tellement à dire sur les comportements de chacun, sur ceux qui n’ont pas cherché le compromis ni respecté la règle majoritaire, ou qui l’ont fait seulement quand ça les arrangeait. Ceux encore qui ont considéré qu’ils pouvaient être candidats à des primaires et ensuite quitter le PS.

Quelles doivent être les relations du PS avec Benoît Hamon ? Et avec Jean-Luc Mélenchon ?

Pour l’instant, la question est plutôt posée aux personnes que vous évoquez, dont l’une a pour objectif la disparition du PS et l’autre vient de quitter le parti. Moi je dialoguerai avec tous ceux qui le souhaitent à gauche. Et je ne parle pas uniquement des chefs de parti : il faut discuter avec les Français qui se sont reconnus dans Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon mais aussi Emmanuel Macron.

Le PS doit-il être dans une opposition ferme ou constructive vis-à-vis d’Emmanuel Macron ?

Il faut être une opposition de gauche, responsable. Or il y a en ce moment un gouvernement qui n’est pas de gauche et une gauche qui n’est pas de gouvernement. A nous de redéfinir ce que peut porter une gauche de gouvernement.

Je revendique l’autonomie politique des socialistes. Nous n’avons pas à nous déterminer en fonction des uns ou des autres. Le signal de notre réussite sera demain notre capacité à faire vivre le débat national autour de nos propres positions.

Quelle est la prochaine grande échéance électorale pour le PS ?

L’objectif, c’est qu’en 2021, au terme de la séquence électorale que constituent les européennes, les municipales, les départementales et les régionales, nous soyons redevenus la première force politique à gauche. Après, je sais très bien que les échéances vont être difficiles, que nous ne sommes pas attendus. Pour réussir, nous devrons rassembler les socialistes, redevenir crédibles et porter des idées nouvelles.

Propos recueillis par Enora Ollivier pour Le Monde.

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